Quelle modernisation du réseau électrique pour accueillir la transition énergétique ?
de sortir des énergies fossiles, d’accélérer le rythme de développement des énergies renouvelables (EnR), de relancer un programme nucléaire et de mieux maîtriser les consommations électriques, pour limiter la hausse des besoins électriques dans les années à venir, liée à l’électrification des usages (transports, industrie…). En d’autres termes : les sites de production d’électricité ne seront plus répartis au même endroit et n’injecteront pas leur kW de la même façon qu’hier dans le réseau. La consommation d’électricité, elle, va augmenter. Le réseau de transport d’électricité est-il prêt pour cette restructuration des flux électriques ? Comment anticipe-t-il les bouleversements qui l’attendent dans le cadre de la transition énergétique de la France ?
Transition énergétique et réseau électrique : de quels bouleversements parle-t-on ?
1. Une nouvelle répartition géographique des sources de production d’électricité
Rien que sur les 15 prochaines années, la PPE prévoit :
- la fermeture de 2 centrales à charbon et de plusieurs réacteurs nucléaires vieillissants, représentant chacun plusieurs centaines de MW, et majoritairement situés dans l’Est de la France
- la mise en service de l’EPR de Flamanville et de 8 parcs éoliens offshore, représentant chacun plusieurs centaines de MW, et majoritairement situés dans l’Ouest de la France
- un fort développement des EnR, dispersés en de multiples sites de production, sur toute la France, y compris dans des territoires qui n'étaient jusque récemment pas producteurs d'électricité

2. Une plus grande variabilité des flux entrants
Les EnR ne fonctionnent pas 100 % de leur temps et sont dépendantes des conditions météorologiques. Leur gestion demande donc de l’agilité : il faut pouvoir prendre l’électricité là où elle est abondante, pour l’amener là où elle est attendue.
3. Un recours accru à l’import-export d’électricité en Europe
Que ce soit pour des raisons économiques (achat d’une électricité moins chère…) ou pour sécuriser l’approvisionnement des Français en électricité (pic de consommation exceptionnel, arrêt soudain d’une centrale…), .
4. Une hausse des besoins en électricité
Comment préparer le réseau électrique à cette transition énergétique ?
1. En redimensionnant les lignes existantes
Les infrastructures devront être en capacité de recevoir l’électricité produite par les nouvelles centrales et d’alimenter les nouveaux besoins. Des lignes 225 kV construites après-guerre peuvent ainsi être remplacées par des lignes de plus grande puissance, à 400 kV, tandis que la modernisation des postes de transformation peut s’accompagner d’une extension de leurs capacités de traitement.
Ex : dans la Métropole lyonnaise, la moitié du réseau a été renouvelé et restructuré pour accompagner l’émergence de nouveaux quartiers et le développement économique du territoire :
- création d’une nouvelle ligne
- remplacement de 7 lignes par des câbles de plus grande capacité
- extension et modernisation de 3 postes de transformation électrique
[VIDÉO] Les Gros Mots - Un transformateur, c'est quoi ? (1:04)
Les postes de transformation jouent un rôle clé dans la modernisation du réseau électrique. Mais concrètement, à quoi sert un transformateur ? Voici une explication simple et claire.

[Cette vidéo réalisée pour RTE explique le rôle crucial des transformateurs dans le réseau électrique, permettant de moduler la tension pour le transport et la distribution d’électricité.]
Un transformateur, c’est quoi ?
Cet appareil est l’élément clé d’un poste de transformation électrique.
Il sert à modifier la tension d’un courant alternatif, à la hausse ou à la baisse selon l’endroit du réseau où il est installé.
En sortie de centrale, il permet ainsi d’élever la tension de 20 000 à 400 000 V pour préparer le courant à un transport sur de longues distances.
En effet, avec une tension plus haute, le courant rencontre moins de résistance dans les matériaux conducteurs. Il y a moins d’échauffement, donc de pertes énergétiques.
En revanche, à l’entrée des réseaux de distribution, c’est l’inverse : on abaisse la tension de 400 000 à 90 000 V (ou à 20 000 V), valeurs adaptées à l’industrie ou au ferroviaire.
Pour desservir les habitations, on passe même à 220 V, la basse tension étant plus sûre et supportable par les appareils domestiques.
En somme, les transformateurs permettent de jongler entre les contraintes du transport et de la distribution d’électricité.
2. En construisant de nouvelles lignes
Certains chantiers sont très visibles, comme :
- la construction ou le renforcement de 10 interconnexions européennes d’ici à 2035
- le raccordement sous-marin des 8 parcs éoliens offshore d’ici à 2029
D’autres chantiers, plus discrets, visent à raccorder de nouveaux sites ou à renforcer le maillage du territoire, via par exemple la création de lignes et postes électriques, ou encore le renforcement d’infrastructures existantes
Rien qu’en 2020, entre grands et petits projets, sur 105 942 km de lignes (aériennes et souterraines) : 238 km de nouvelles lignes ont été créées et 24 nouveaux postes électriques ont été raccordés au réseau.

[VIDÉO] Les Gros Mots - Un sectionneur, c'est quoi ? (01:10)
La construction et le renforcement des lignes électriques impliquent différents équipements, dont les sectionneurs. Découvrez leur utilité et leur fonctionnement en vidéo.

[Cette vidéo réalisée pour RTE présente le rôle du sectionneur, garantissant la sécurité du personnel en coupant le circuit électrique lors des interventions.]
Un sectionneur, c’est quoi ?
Derrière ce nom qui semble tout droit sorti d’un film d’horreur, rien d’inquiétant. Au contraire !
Ce dispositif assure la sécurité du personnel intervenant dans les postes électriques.
Installé sur le circuit, il est composé de deux pièces électromécaniques qui, habituellement raccordées, peuvent s’ouvrir et s’éloigner l’une de l’autre, pour couper visiblement le circuit.
Contrairement aux « boites noires » que sont les disjoncteurs ou interrupteurs, qui n’offrent pas de visibilité sur l’ouverture ou la fermeture du circuit, le sectionneur est particulièrement adapté aux travaux sous haute tension.
La coupure, bien visible, est une garantie de sécurité.
Surtout, elle créé une distance suffisante pour éviter tout passage de courant inopiné.
Les opérateurs peuvent ainsi intervenir en toute sécurité sur la partie isolée (une ligne à haute tension ou un transformateur par exemple).
Il suffit ensuite de refermer l’appareil en réunissant les deux pièces pour que le courant passe de nouveau.
Finalement, ce n’est pas un gros mot ! Et c’est même très utile pour la modernisation du réseau !
[VIDÉO] Les Gros Mots - Le courant continu c'est quoi ? (1:31)
Le courant continu est essentiel pour transporter l’électricité sur de longues distances, notamment dans les interconnexions européennes. Mais qu’est-ce que c’est exactement ? La réponse ici.

[Cette vidéo réalisée pour RTE explique le courant continu haute tension (CCHT), qui réduit les pertes d’énergie et s’adapte aux énergies renouvelables et aux nouveaux usages électriques.]
Le courant continu, c’est quoi ?
Le courant continu est un type de courant électrique dans lequel les électrons circulent toujours dans la même direction, d’un point chargé positivement au sens électrique, vers un point chargé négativement.
Développé à la fin du 19ᵉ siècle, il a rapidement été éclipsé par son rival : le courant alternatif dans lequel les électrons font de minuscules allers-retours pour transmettre la charge électrique.
Ce dernier est plus adapté à la production à partir des machines tournantes (alternateurs) et au changement de niveau de tension.
Mais aujourd’hui, le courant continu prend sa revanche.
Le courant continu haute tension (CCHT) offre des avantages non négligeables, puisqu’il limite les pertes d’énergies liées au transport sur de longues distances, tout en correspondant au courant produit par les nouveaux moyens de production comme l’éolien et le photovoltaïque.
Le courant continu s’impose donc pour insérer davantage :
- D’interconnexions électriques transfrontalières
- D’éolien offshore
- D’énergies renouvelable en général
Le courant continu est par ailleurs plus adapté aux nouveaux usages électriques : les appareils électroniques, les batteries, les lignes ferroviaires… consomment ce type de courant.
Un comeback (retour) à suivre, donc !
3. En numérisant le « système nerveux » du réseau électrique
36 % des postes de contrôle-commande RTE sont déjà numérisés en 2020. Le reste le sera d’ici 2040. Cela permet notamment de rendre plus « agile » le réseau de transport d’électricité et ainsi de faire face au défi présenté par les EnR.
[VIDÉO] Les Gros Mots - Un creux de tension, c'est quoi ? (01:12)
La numérisation du réseau vise aussi à gérer les défis posés par les énergies renouvelables, comme les creux de tension. Voici ce qu’il faut savoir sur ce phénomène.

[Cette vidéo réalisée pour RTE explique ce qu'est un creux de tension, une baisse temporaire de la tension pouvant perturber les équipements sensibles, et comment RTE minimise les risques.]
Un creux de tension, c’est quoi ?
Il s’agit d’une baisse de la tension d’alimentation d’un site, d’au moins 10 %.
Comme cette perturbation dure le plus souvent beaucoup moins qu’une seconde, elle est presque imperceptible dans une maison.
En revanche, dans une usine, l’évènement, même furtif, peut être très impactant : certains équipements automatisés, particulièrement sensibles, dysfonctionnent ou s’arrêtent, occasionnant des perturbations ou des arrêts systèmes.
Aucun réseau n’est à l’abri des creux de tension car ils surviennent principalement lors d’évènements que l’on ne maîtrise pas : foudroiement du réseau, tempêtes… qui provoquent des courts-circuits.
Même si la situation est rétablie quasi instantanément, ces courts-circuits, qui sont en fait une mise à la terre involontaire d’un point du réseau électrique suffisent à créer une brève chute de tension dans les lignes alentours.
Par ses actions continues de protection et de fiabilisation du réseau électrique, RTE fait tout son possible pour diminuer les risques de creux de tension et atténuer leur impact chez ses clients.
Voilà voilà, vous savez tout sur les creux de tension !
Combien coûte cette modernisation du réseau ?
33 milliards d’euros bruts investis par RTE dans la modernisation de son réseau d’ici 2035, soit 2,2 milliards d’euros/an, répartis comme suit :

Ces chiffres sont importants en valeur absolue, mais doivent être relativisés :
- La majorité des lignes à redimensionner devaient de toute façon être renouvelées : leur moyenne d’âge est de 50 ans
- Cela ne représente qu’une petite part (16 à 22 %) des 150 à 20 milliards d’euros nécessaires pour moderniser l’ensemble du système électrique (construire de nouvelles centrales de production renouvelables et nucléaires…)
Si la transformation du réseau n’était pas au rendez-vous pour accueillir, aux dates prévues, la mise en service des nouveaux sites de production, ou s’il fallait accélérer les travaux pour rattraper le retard, il y aurait des pénalités, des surcoûts, des pertes financières et des manques à gagner.